lundi 5 mars 2012

Oslo, 31 août : vertige du néant


Anders a 34 ans et dresse un constat désespéré de son existence : «Je n'ai rien, je dois tout recommencer.» Rien construit, rien appris, pas aimé, tout détruit.

  
Anders est héroïnomane. En cette fin de mois d'août à Oslo, il obtient ses premières permissions au terme d'une longue cure de désintoxication. Si le poison semble lui laisser quelque répit, ses idées noires le torturent. Le film s'ouvre sur une relation sexuelle mécanique, qui creuse encore le vide intime du protagoniste et le conduit à une tentative de suicide.
Puis vient ce voyage à Oslo, pour un entretien d'embauche au poste de secrétaire de rédaction d'une revue. Anders est un intellectuel. Avant... avant la drogue, il a publié une poignée d'articles dans un journal estimé. Mais l'acuité de son intellect se retourne contre lui et le transperce, le torture. Ses analyses débouchent sur un néant vertigineux, un gouffre existentiel dans lequel les drogues l'aident à se noyer.
Le film suit l'errance d'Anders dans la capitale, d'un lointain ami à l'autre, de discussions en réflexions. Réminiscences d'antan, constats implacables et cyniques. Et pourtant la vie, les hommes ; pourtant, partout, le monde bruisse de rencontres et de conversations, de rires et de pensées; brille d'une beauté de fin d'été.
C'est dans cette fine analyse d'un désarroi existentiel –et l'esquisse de son remède– que le second long-métrage de Joachim Trier est le meilleur. Impossible de ne pas acquiescer aux idées noires, aux conclusions cinglantes de ces hommes inadaptés, trop gâtés, trop intelligents. «Il faut être bête pour être heureux», disent Anders et son ami de jeunesse.


Mais quand le film délaisse ces réflexions pour une virée nocturne en forme de spirale, il devient plus convenu, plus attendu, même s'il préserve quelques belles scènes, des fulgurances. Dommage, car ce 31 août à Oslo a la noirceur éclatante des journées où des amis brillants ressassent le néant d'une existence.
4/5

Oslo, 31 août, un film de Joachim Trier (Norvège, 1 h 36)
Avec Anders Danielsen Lie...